Cimetière de Morne-à-l’Eau, au cœur du patrimoine Guadeloupéen
Chaque année, des milliers de touristes s’arrêtent pour admirer le cimetière de Morne-à-l’Eau. Tous sont surpris par sa topographie à flan de morne mais surtout de l’uniformité des caveaux en damiers noirs et blancs. Un tableau d’autant plus mystérieux que durant les célébrations, il s’illumine de milliers de bougies.
Le cimetière de Morne-à-l’Eau a été implanté à cet endroit au moment du déménagement du bourg de la commune de Vieux-Bourg à son emplacement actuel en 1847. Sa disposition, dans cet amphithéâtre naturel bordé d’une intense végétation, est la première de ses spécificités principales, la seconde est le choix caveaux ornés de motifs en damiers noirs et blancs. Ces deux caractéristiques en font l’un des lieux les plus reconnaissables et les plus singuliers de l’archipel. Mais il témoigne aussi clairement de la place de la mort dans les traditions et l’identité Guadeloupéenne. S’il n’existe pas de raison connue qui explique l’uniformité si parfaite des motifs, on y voit en revanche des caveaux extrêmement ouvragés qui abritent les dépouilles de familles entières.
Honorer la mort comme la vie
La culture Guadeloupéenne qui mêle vieilles traditions européennes, espagnoles, amérindiennes et animisme Africain a toujours laissé une grande place au mythe et à l’intangible. La raison et la croyance se côtoient sans se déranger autour d’une ligne parfois trouble. C’est ce qui explique pourquoi il est si important d’honorer la mort avec autant qu’on aime la vie. Cet esprit est visible dans le soin qui est mis sur la construction des caveaux. Les familles demandent aux architectes de mettre un soin particulier dans l’édification de leur dernière demeure. Même les familles aux revenus modestes mettent un soin particulier à la création des caveaux. Toutefois, la raison pour laquelle le motif des damiers a été choisie reste encore mystérieuse. On suppose qu’il a été adopté par quelques familles et les autres ont suivi jusqu’à ce que son adoption devienne un accord tacite entre les Mornaliens.
Illuminations
À l'approche des festivités de la Toussaint, les familles engagent des ouvriers ou des “jobeurs” chargés de remettre les tombes en état. Ils refont la maçonnerie quand c’est nécessaire, désherbent, repeignent, gravent de nouveau les noms que le temps et la météo ont effacé. Une fois les tombes remises en état, le 1er novembre, les familles se réunissent pour prier et les illuminer. C’est une manière de se souvenir des défunts et de leur influence sur la famille, de les présenter aux plus jeunes et ainsi, le temps d’une soirée, leur redonner leur place dans la famille. Cette tradition fait partie d’un ensemble de conceptions selon lesquelles, même dans son repos éternel, le défunt doit continuer à être traité avec respect et amour, justement pour qu’il puisse être en paix. À aucun autre moment, la limite entre la mort et la vie n’est aussi fine.