La “success story” des Indiens de Guadeloupe

22 novembre 2021

Du fait de son statut de colonie de peuplement, la Guadeloupe est composée de plusieurs communautés arrivées sur les côtes au gré des fluctuations de l’Histoire. Parmi elles, les ressortissants de l’Inde britannique venus avec l’espoir de conditions de vies meilleures.

L’abolition de l’esclavage promulguée définitivement en 1848 dans les Antilles Françaises plonge les anciens propriétaires d’esclaves dans une situation compliquée. Si certains esclaves acceptent de devenir ouvriers agricoles, les colons ne sont pas disposés à payer la rémunération qu’ils demandent alors.

En quête d’une nouvelle main d’œuvre qualifiée et peu chère, les colons se tournent vers l’Inde et concluent un accord avec la Grande-Bretagne afin de faire venir des travailleurs indiens dans les colonies de la Caraïbe. Cet accord tombe à pic pour les Britanniques qui gèrent alors des comptoirs très densément peuplés.

En Inde, des agents spécialisés dans l’engagement des futurs déportés indiens, se chargent de trouver des travailleurs à convaincre. Ils se heurtent rapidement à un obstacle culturel chez la communauté hindoue pour qui l’Océan est un espace tabou (Kala Pani) et qui refusent d’embarquer sur les bateaux. Pour résoudre ce problème, les colonies sont décrites comme idylliques où il est facile de faire fortune. De réels eldorados.

Sur toute la durée du recrutement, ils réussiront à convaincre plus de 150 000 Indiens.

La grande désillusion

Les premiers engagés Indiens arrivent en Martinique en mai 1853 après 90 jours de traversée. Ils comprendront rapidement que la vie sera nettement plus difficile que celle qu’on leur avait promis. Si les colons qui les engagent leur fournissent un hébergement (similaire à celui des anciens esclaves), les mauvais traitements sont légion et la paie finalement très basse (un peu plus de 12 francs par jour). Ils sont mal vus par les anciens esclaves qui les accusent de casser les prix et de voler leurs emplois et font face au racisme systémique des sociétés de l’époque.

Confrontés au rejet des autres communautés de l’île, à leurs mauvaises conditions de vie, aux problèmes de communication (venant de provinces différentes, tous ne parlent pas la même langue), et aux tentatives de christianisation de l’Eglise Catholique, la situation de la communauté Indienne est presque insupportable. De plus, leur statut administratif est complexe, puisque, même installés sur le sol Français, leur contrat stipule qu’ils demeurent, ainsi que leurs descendants des ressortissants britanniques.

Pour s'échapper de cette impasse, beaucoup décident d’utiliser le billet de retour dont ils disposent, d’autres provoquent délibérément des émeutes afin d'être déportés au bagne de Guyane où ils ont l’assurance de manger correctement et d’être soignés.

Résilience et honneur

Malgré les obstacles, de nombreuses familles tiennent le coup et s’accrochent à leurs traditions et leur culture, même en faisant mine d’adopter les mœurs chrétiennes. Lentement, mais sûrement, le créole devient la langue de communication des indiens entre eux et avec les autres membres de la société, puis le Français. Mais il faudra attendre 1923 et l’action de Henry SIDAMBARON afin que ces Indiens et leurs descendants acquièrent la nationalité Française.

Attachés à la terre, à l’héritage et à la famille, les Indiens s’implantent voire même se mélangent pour devenir une communauté Guadeloupéenne à part entière. Les liens avec l’Inde n’ont jamais réellement été coupés, tant grâce au maintien des rites religieux que celui de la langue hindoue (même si elle n’est pas identique à celle parlée en Inde). Selon les registres des comptoirs, 25 000 Indiens se sont installés en Martinique, 42 000 en Guadeloupe et plusieurs milliers en Guyane.


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