Le “lolo péyi” histoire d’une Guadeloupe qui ne doit pas disparaître

9 mars 2022

«Vinn vann ! »
Jadis, tous les quartiers, toutes les sections, vivaient organisés autour de leurs lolos. Ces petites boutiques spécialisées dans la vente de produits alimentaires ou de produits dits “de dépannage” étaient l’un des centres de la solidarité et du partage de la communauté. Cet esprit, perdu avec l’arrivée des boutiques et des centres commerciaux, certains essaient de le conserver. C’est le cas de Michelle Makaïa-Zénon à la tête du projet “Lolo Péyi”.

Le Nord Guadeloupe : Avant d’aller plus loin, il est important de donner une définition. Qu'est-ce-qu'un lolo ?

Michelle Makaïa-Zénon : Un lolo est un petit commerce de proximité à dominante alimentaire proposant des produits et des services. C’est un espace de solidarité et de cohésion sociale. La vente se fait à travers le vendeur qui s’occupe de la commande du client. Cet aspect est très important, car dans le cas contraire le commerce tient plus du “libre-service” que du lolo, c’est d’ailleurs pour cela qu’un lolo, un vrai, dispose à son entrée d’un comptoir. On y trouve des produits d’urgence et de dépannage ou éventuellement tout ce dont on a besoin. En effet, si le tenancier ou la tenancière du lolo a la possibilité de commander un besoin particulier, elle le fera afin que, la prochaine  fois, elle puisse répondre à la demande.

Quand on parle de lolo, en dehors du commerce, on parle de solidarité et d’écoute, car c’est une zone tampon et de veille. Là-bas on discute de ce qui se passe dans le quartier, de Madame Untel qui a du mal à gérer son mari, de Monsieur Untel qui a dormi dehors (rires). La tenancière du lolo peut aussi faire crédit en échange d’un bon potin. C’est le reflet de la société.

LNG : Comment expliquer que ce type de commerce particulier se soit implanté en Guadeloupe ?

M.M.Z. : Le lolo prend son origine dans l’ère de la colonisation. Dans le Code Noir, il est stipulé que les maîtres devaient nourrir ses esclaves. C’est pour cela que l’importation de viande séchée et salée s’est généralisée, ainsi que la farine, car mélangée à l’eau, ça permet d’avoir des repas consistants pour très peu chers. Le 2ème marqueur historique du lolo, c'est le jardin amérindien. C’est la genèse de notre construction.

LNG : Le lolo est aussi un espace de discussion. Comment cela s’exprime ?

M.M.Z : C’est la buvette qui fait – en partie – office d’espace de discussion. Mais attention, la buvette est généralement un espace réservé aux hommes. Et c’est aussi grâce à elle que la tenancière s’en sort. Le cercle des hommes qui fréquentent une buvette est régi par des règles et des codes. Chacun paie son “sec” et celui qui ne paie jamais aura une très mauvaise réputation et pourra être exclu du cercle. J’ai moi-même dû faire preuve de patience pour avoir le droit de connaître ces codes dans le cadre de la formation de mon projet.

LNG : Le lolo a-t-il encore sa place dans notre société actuelle ?M.M.Z : Oui, j’en suis convaincue. L’image même de cette boutique a changé, ce n’est plus un espace pour les pauvres ou les démunis. Plus que jamais, notre société a besoin d’échange, de cohésion sociale et d’un retour des valeurs qui font le fondement de sa culture et d’une manière son identité.

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